2,
Le médecin du travail et lalcoolo-drogué
En commission de santé,
le médecin du travail rappelle des objectifs évaluables
qui sont de réduire : les accidents de toute nature
(et pas seulement du travail), journées d'hospitalisation,
invalidités, malfaçons, dégradations,
bagarres, morts violentes, suicides, mutations, et licenciements
individuels.
Les
rôles du médecin du travail varient suivant les
circonstances :
la visite d'embauche,
le cas d'une intoxication connue,
l'occasion procurée par un incident,
le cas d'une intoxication restant à dépister,
le cas d'un médecin interentreprises,
le cas d'un arrêt de travail.
Il lui faut admettre les délais de la réinsertion.
a,
La visite d'embauche
Les drogués sont volontiers
candidats à des postes de la fonction publique, qui
leur offrent les meilleures chances de conserver leurs habitudes.
La visite dembauche
est régie par le médecin du travail qui peut
en publier les modalités.
La visite médicale dembauche
comportera un questionnaire
de santé confidentiel et des tests psychomoteurs,
par exemple des mesures du temps de réaction :
ils serviront de termes de comparaison en cas de troubles
ultérieurs du comportement.
Tout candidat utilisant un
médicament susceptible daltérer la vigilance
est prié de lindiquer lors de la visite médicale
dembauche en y joignant copie de la ou des ordonnances.
La détection des
substances psychotropes (médicaments, alcool, drogues)
est une décision du médecin du travail. Il peut
la proposer à tous les candidats à l'embauche.
Ceux-ci ont le droit de la refuser. Elle ne peut être
imposée à l'embauche que pour les postes de
sécurité inscrits au règlement intérieur
(Article R. 4624-25 du code du travail). Le salarié
doit être informé par le médecin du travail
du test prescrit.
Les tests de dépistage
des drogues illicites sont nécessairement pratiqués
par un médecin ou un biologiste, contrairement au
dépistage de l'intoxication alcoolique.
Les résultats des tests sont soumis au secret médical.
À lui seul, le dépistage
ramène souvent les buveurs excessifs à la
modération (Huas), mais non les personnes souffrant
de dépendance, définitivement incapables de
modération.
Cet effet bénéfique est à méditer
par les adversaires du dépistage.
Avant la fin de la période
dessai, de nouveaux tests psychomoteurs et une éventuelle
seconde détection seront proposées, toujours
couverts par le secret médical.
Offrir cette chance de samender discrètement
dans l'intervalle, cest agir en faveur de lemploi.
S'il y a lieu de refuser l'aptitude
au poste, le médecin du travail préfère
le motiver par les résultats insuffisants des tests
psychomoteurs.
Les formations en alternance
amènent en entreprises de nombreux jeunes consommateurs
de drogues. Les postes de sécurité ne sont
pas pour eux.
Il nest pas rare quun drogué postule
pour un poste de sécurité et soit satisfait
dun refus, qui lui permet de conserver lassurance
chômage.
b,
Cas dune intoxication
connue
Le médecin assure l'intéressé du secret
médical et évoque avec lui le motif de sa visite.
Il est possible au médecin
de travail d'entamer la conversation sur "le problème
d'alcool" à tout moment, de préférence
pendant ou après l'examen physique, mais les chances
de succès sont bien meilleures sil est appelé
par le secouriste en cas d'incident.
Un dépistage peut
être maladroit sil contredit lintéressé
de front. Une approche empathique et efficace est
préférée dans le livre Drogues,
alcool : en parler en famille.
Les médecins du travail
sont irremplaçables mais ceux compétents en
addictologie sont trop rarement disponibles. Le médecin
du travail doit être capable de distinguer les personnes
dépendantes de lalcool, qui relèvent du
soin ; et les buveurs excessifs non dépendants,
qui relèvent pour la plupart dinterventions brèves
répétées à base dentretiens
motivationnels, dans lesquelles les infirmières excellent.
Le médecin du travail
propose d'alerter le médecin traitant. Il
indique les adresses des associations d'entraide.
Il indique que l'assistante de service social est prête
à le mettre en relation avec un collègue rétabli
de l'alcool ou de drogues.
Le changement prioritaire est
celui du comportement plutôt que celui du poste de travail.
Une difficulté apparaît si lemalade a fait une
alliance douteuse avec son généraliste, en se
déclarant persécuté.
Le convalescent aura des
rendez-vous périodiques, tant avec son médecin
qu'avec son groupe de rétablis.
En cas de reprise de consommation
après dépendance, le médecin du travail
prononce une inaptitude temporaire et incite lintéressé
à téléphoner séance tenante à
un alcoolo-drogué rétabli.
c,
Occasion procurée par un incident
La procédure négociée
par le Dr. Gérard Simon (1996) à Carignan (Ardennes),
y compris avec l'Inspecteur du Travail, était que,
devant un comportement anormal, un accident ou une bagarre,
un membre de la Commission Santé, émanation
du CHSCT, proposait à l'intéressé de
désigner le secouriste de son choix sur la liste
des 10 secouristes volontaires ayant reçu la formation
adéquate.
S'il acceptait le secours
assorti du contrôle, ce qui a été le
cas 96 fois sur 100, il était assuré de
ne pas être sanctionné quel que soit le
résultat, l'objectif étant la protection de
l'emploi autant que la prévention des dommages.
Le secouriste l'emmenait dans
un local discret de l'infirmerie pour contrôler l'alcoolémie
(il nétait pas encore question de drogues à
lépoque). Ue alcoolémie entre 0,5 et 0,8
g/l imposait une inaptitude de deux heures. Un taux supérieur,
une inaptitude jusqu'à fin de poste. La fiche de résultat
était déposée dans une boîte dont
seul le médecin détenait la clef.
Le médecin incitait
ensuite l'intéressé à une démarche
thérapeutique volontaire.
S'il refusait les soins médicaux, acceptait-il la
visite d'un buveur rétabli ? Celui-ci l'emmènerait
aux réunions de son association, comme Alcool-Assistance,
Alcooliques Anonymes, Vie libre, Croix-bleue, etc.
d,
Cas dune intoxication restant à dépister
Le médecin du travail
assiste la commission de santé pour négocier
et publier des mesures collectives. La plupart de celles énoncées
plus haut ont été imaginées et mises
en oeuvre par G. Simon et publiées par lui avec Besançon
(2002).
Le dépistage par le
questionnaire AUDIT
est bien accepté et efficace, révélant
environ 9% de buveurs abusifs (INPES).
Les détections dalcool,
de drogues et autres toxiques sont autorisées chez
les personnels occupant des postes de haute sécurité,
postes dont la liste doit être publiée au règlement
intérieur.
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