Prévenir les risques en matière de ressources humaines, telle est la mission des gestionnaires de risques psychosociaux. Gros plan sur ce nouveau métier appelé à se développer en 2012 dans les trois versants de la fonction publique
Une compétence recherchée. Favoriser le bien-être au travail des agents pour contribuer à la performance des administrations et à la qualité du service rendu aux usagers. Pour porter cette nouvelle priorité du ministère de la Fonction publique, concrétisée par l’accord “Santé et sécurité au travail dans la fonction publique” de 2009, les administrations, les hôpitaux et les collectivités commencent à faire appel à des gestionnaires de risques psychosociaux. Stress, rythmes de travail, absentéisme, harcèlement, traumatismes : autant de sujets pour lesquels ces “risk managers” d’un nouveau genre sont chargés de mettre en place des plans de prévention.
Les gestionnaires de risques n’existent pour le moment que dans les grandes collectivités, les hôpitaux universitaires et les administrations d’État. “Cette fonction est devenue nécessaire dans les collectivités, observe Stéphane Pintre, président du Syndicat des directeurs généraux des collectivités territoriales. Mais par manque de budgets, elle est généralement assumée par les directeurs généraux des services.” Et le quotidien du “risk manager” embrasse souvent d’autres thématiques (risques financiers, risques opérationnels…) que le seul domaine psychosocial.
Une mission touche-à-tout. “Parce que son champ d’intervention concerne l’ensemble des services, le gestionnaire de risques psychosociaux doit être légitimé par la direction centrale”, estime Philippe Marin, responsable de la formation des directeurs d’hôpital à l’École des hautes études en santé publique (EHESP). Pour lui, la gestion “RH” des risques ne peut relever d’une hiérarchie en “tuyaux d’orgue” : le champ d’intervention du “risk manager” est transversal. Il doit être capable de convaincre du sens de son action des chefs de service pas toujours enthousiastes à l’idée de repenser leur management. Expérience, leadership, compétences interdisciplinaires, sens du dialogue : telles doivent être ses principales qualités. Et s’il est le plus souvent directement rattaché à la direction centrale, il doit aussi travailler en étroite collaboration avec la direction des ressources humaines.
Un métier d’avenir. “Il est aujourd’hui nécessaire de réinventer le management des ressources humaines dans la fonction publique”, affirme Frédéric Valletoux, président de la Fédération hospitalière de France (FHF) et maire UMP de Fontainebleau. Pour lui, aucun doute, les gestionnaires de risques psychosociaux sont appelés à se multiplier. D’autant plus que les réorganisations initiées par la Révision générale des politiques publiques (RGPP) devraient continuer de transformer la vie des agents. Ils auront donc besoin d’être accompagnés par leurs gestionnaires de risques, véritables médecins des ressources humaines.
Olivier Martel, "risk manager" à la mairie de Paris
Des dizaines de métiers, quelque 52 000 fonctionnaires… En matière de prévention des risques psychosociaux, Olivier Martel ne chôme pas. Responsable de la cellule de gestion des risques de la ville de Paris depuis 2009, cet ancien professeur d’histoire, diplômé de l’ENA et passé par la direction du Trésor de Bercy, a contribué à la mise en place d’une cartographie globale des risques dans l’ensemble des directions de la mairie. Plusieurs indicateurs sont particulièrement suivis.
“Mon travail consiste à infuser une culture du risque dans la gestion au quotidien des services”, précise-t-il. Olivier Martel fixe le cap en laissant la main aux cadres opérationnels pour décliner concrètement, dans chacune de leurs directions, la politique impulsée par le secrétariat général, alors qu’un comité de suivi veille tout en haut de la hiérarchie à l’avancée des objectifs. “C’est un travail de longue haleine”, observe le “risk manager”, qui ne veut rien imposer aux chefs de service de la ville. “Lorsque nous avons commencé à déployer notre politique de prévention des risques, certains cadres étaient très rétifs, confie-t-il. La plupart ont adhéré et sont aujourd’hui force de proposition."
La méthode d’un bon gestionnaire de risques ? “Faire preuve de dialogue et d’ouverture. Le gestionnaire de risque ne maîtrise pas le fonctionnement de toutes les directions”, analyse le haut fonctionnaire. S’il est trop tôt pour mesurer les effets de cette gestion interdisciplinaire, Olivier Martel en est convaincu : “La gestion préventive des risques concourt au bon fonctionnement de l’administration. Un agent travaillant dans des conditions optimales sera plus efficace.”
Sylvain Henry
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